Aux lointains
Durée : 50min
Pour écrire Aux lointains, Aurélien Dougé entreprend des marches au Japon et dans les Alpes suisses. Ces traversées solitaires font naître une attention portée aux trajectoires, aux gestes ordinaires, aux micro-événements qui échappent habituellement au regard. De cette matière patiemment recueillie émerge un solo suspendu, où le corps fait résonner, transforme et relie les fragments d’une expérience du paysage et du temps.
Sur un plateau dépouillé, le danseur déploie une partition chorégraphique rigoureuse, presque topographique. Porté par les vibrations d’un orgue positif – joué hors champ par Rudy Decelière – il creuse le vide, comme si chaque geste cherchait sa propre mémoire. Au fil des répétitions apparaissent des motifs : rémanences, traces, échos d’un ailleurs dessinant un territoire en perpétuelle recomposition. Dans la continuité de ses recherches sur les relations entre corps et matière, l’artiste confère à des éléments simples une présence quasi magnétique. Cinq anciennes lampes industrielles à gaz diffusent une lumière fragile et instable ; un ruban métallique scintille ; quelques pierres glanées au fil de ses itinérances deviennent des repères. Peu à peu, un nuage se forme, né d’un jeu subtil entre les flux d’air et la présence du public. Suspendu, insaisissable, il condense l’esprit de la pièce : rendre visibles les forces qui circulent entre les corps, les matériaux et les lieux. Aux lointains apparaît alors comme un théâtre de phénomènes, où la moindre vibration devient signe et où l’infime acquiert une puissance d’apparition.